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Denis Dufour | Notice des œuvres

Les Fleurs enchantées 

2014 | 12’00 | opus 173 | éditions Maison Ona

pour trois flûtes et support audio

• Dédié au Trio d'Argent en hommage à Jean-Philippe Rameau

• Commande du Trio d'Argent

• Création aux Lilas, Le Triton, le 13 novembre 2014 par Michel Boizot, François Daudin Clavaud et Xavier Saint-Bonnet

« Les géomètres même s'en mêlèrent ; ils louaient les calculs immenses qu'ils avaient faits pour trouver moyen de parcourir dans les airs de violon toutes les différentes combinaisons d'un ré ou d'un mi, avec les autres notes. Il est vrai que cet air n'avait point de chant, et dans cette musique contrainte et si pénible à composer, rien ne coulait de source, nul génie ne les animait, ils fuyaient la nature et le sentiment. […] La plupart des spectateurs s'écrièrent que les instruments étaient faux, leurs sons faisaient peine aux oreilles les moins délicates ; on leur déclara dogmatiquement que c'était des dissonances faites exprès et le chef-d'œuvre de l'art […]. On parcourait tous les tons avec rapidité, les dissonances prodiguées sans cesse ; quelquefois on s'obstinait à rebattre deux notes pendant un quart d'heure, beaucoup de bruit, force fredons. Et lorsque par hasard il se rencontrait deux mesures qui pouvaient faire un chant agréable, l'on changeait bien vite de ton, de mode et de mesure ; toujours de la tristesse au lieu de tendresse, le singulier était baroque, la fureur du tintamarre ; au lieu de gaité, du turbulent, et jamais de gentillesse, ni rien qui put aller au cœur. » [Lettre de M.*** sur l'origine de la musique, Mercure de France, mai 1734. Critique écrite peu après la création de Hippolyte et Aricie de Jean-Philippe Rameau]

Si Dufour emprunte au matériau ramiste (celui de Zaïs, de Zoroastre, des Boréades, de Dardanus, de Platée…), il n’en conserve ni le langage ni les conventions d’époque. L’écoute du compositeur s’oriente d’avantage vers les figures et processus d’écriture les plus caractéristiques de son modèle, telles que répétition, balancement, attaque énergétique, rupture ou irruption impromptues, trait de virtuosité, saut de tessiture, tempi contrastés… qui forment autant de morphologies sonores dont il souligne la plasticité des profils et qu’il articule avec la même précision et la même hardiesse que dans ses ouvrages électroniques. Et quand, ici ou là, subsistent quelques citations inchangées du compositeur des Lumières, parfaitement intégrées à la partition, elles viennent nous en rappeler les audaces. Au sein de cette trajectoire étrange autant qu’inventive, faisant naître aux flûtes des charivaris d’oiseaux très animés, les haut­parleurs projettent par surprise quelques salves de “pétales argentés” – motifs de clavecin de Rameau traités par les moyens électroacoustiques – qui rehaussent ce tableau coloré et instillent une touche de Merveilleux cher aux esprits baroques. [Michèle Tosi].

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