
Denis Dufour | Notice des œuvres
Nautilus
2001 | 07'44 | opus 111 | acousmatique | support audio | 2 pistes | éditions Maison Ona
• Réalisation sur ordinateur au studio du compositeur à Paris 20e
• Prises de son : Denis Dufour
• Création à Perpignan, auditorium John Cage, le 26 février 2002 lors de la saison Écoute Musiques 2001-2002 par Jonathan Prager sur acousmonium Motus
En composant Nautilus pour des séances pédagogiques (Scolacousma (1)), mon objectif était de faire entendre et commenter toutes les étapes de la conception à la réalisation de l’œuvre (2) : l’énoncé du projet, l’idée musicale, les prises de son, les transformations opérées sur le matériau, les montages, les mixages, l’agencement des séquences, les articulations, les variations, les essais intermédiaires… jusqu’au mixage final. J’ai ainsi travaillé sur des intentions simples à expliciter, découlant toutes du titre, Nautilus, nom de ce gros coquillage dans lequel, collé à l’oreille, on peut entendre la mer. De ce mot procèdent autant les matières et les durées des sons utilisés que la construction des phrases ou la structure de l’œuvre.
En effet, en dehors des quelques enregistrements liés au bruit de l’eau (ruisseau, vague, écoulement, clapotis…), j’ai appliqué à plusieurs autres sons des traitements qui les assimilent à l’univers aquatique ou marin : voix d’enfants filtrées, grincements de portes qui se transforment en chants de baleine, gargouillis électroniques, etc.
Par ailleurs le nautile possède une coquille spiralée qui, comme tant d’autres architectures naturelles, est bâtie selon la proportion du nombre d’or. C’est pourquoi j’ai, malgré tout, élaboré Nautilus d’après la suite de Fibonacci (3). En effet, j’ai attribué à chacun des sons utilisés (objets sonores, échantillons, trames ou séquences) une durée calculée selon cette progression : de dix millisecondes pour le son le plus court, puis 20, 30, 50, 80, 130, 210, 340, 550, 890 millisecondes, 1"44, 2"33, 3"77 et ainsi de suite (4) jusqu’à 2'57"11 pour la plus longue séquence qui est un enregistrement des flux et reflux de l’océan, présent tout au long de la deuxième section de l’œuvre.
L’introduction fait entendre les sons comme émergeant progressivement des profondeurs sous-marines et dure 1'49"46. Additionnée à la partie centrale le temps est porté à 4'46"57 (soit 1'49"46 + 2'57"11), ce qui laisse à nouveau 2'57"11 à la troisième partie qui achève l’œuvre d’une durée totale de 7'43"68 (4'46"57 + 2'57"11).
J’ai souhaité ainsi faire comprendre à mon auditoire que des données mathématiques préalablement établies et rigoureusement respectées n’empêchent pas l’expression poétique, le déploiement du son, ni l’éclosion de l’imagination. [Denis Dufour]
1. La première audition de l’œuvre a été donnée à Crest, salle Moulinages de l’Espace Soubeyran, les 5 et 6 mars 2001 devant 350 collégiens de la Drôme.
2. Film Nautilus, du projet à la réalisation par Esteban Zuñiga visible ici : https://creamus.inagrm.com/co/Nautilus.html
3. Leonardo Pisano est un mathématicien du 13e siècle. Il est le précurseur de l’introduction des chiffres arabes en Europe et auteur de la célèbre suite de nombres appelée Suite de Fibonacci : 0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, 89, etc., où chaque nouveau nombre est égal à la somme des deux précédents, et dont la division d’un nombre par celui qui le précède s’approche du nombre d’or (1,618033…).
4. 0"01 - 0"02 - 0"03 - 0"05 - 0"08 - 0"13 - 0"21 - 0"34 - 0"55 - 0"89 - 1"44 - 2"33 - 3"77 - 6"10 - 9"87 - 15"97 - 25"84 - 41"81 - 1'07"65 - 1'49"46 - 2'57"11 - 4'46"57 - 7'43"68



